Ça t’intéressera peut- être ? Ou pas.
A qui s’adresse cette nouvelle rubrique ? Surtout à ceux qui débutent dans le boulot mais peut- être aussi à ceux qui sont plus aguerris dans la pédagogie mais qui ont besoin d’un autre regard sur notre joli métier.
L’idée m’est venue d’un copain de footing, Fred, qui me disait que je devrais compiler mes conseils pour les jeunes. Le « post » m’a semblé être le format idéal.
Mon envie est de partager ma synthèse (à moi) de mes lectures, de ma pratique, de mes échanges, de mes cours à l’INSPE. Ma poésie professionnelle avec toutes ses limites et contradictions. Mon intention n’est pas de faire une conférence sur chaque sujet, d’autres le font bien mieux que je ne pourrais jamais le faire. J’essaierai simplement de partager ce que je fais et ce qu’il y a derrière.
Ça t’intéressera peut- être ? Ou pas. (1) – Réflexions sur des ateliers au CM2.
Une nouveauté dans ma pédagogie ? Non, bien sûr. Mais depuis 3 ans maintenant, je m’impose de travailler chaque jour une fois en ateliers. En format « double niveau » (par exemple un groupe en autonomie équipé d’un corrigé et un autre avec moi) ou en format « 3 ateliers ou plus » (par exemple un groupe joue, un autre réalise un travail plus sérieux dans un manuel et un dernier apprend la leçon en cours).
Dans quelles matières ? En français et en maths surtout ! Evidemment en arts plastiques quand on a du matériel à gérer ou en langues vivantes quand on veut permettre aux élèves de parler plus…
Quels types d’ateliers ai-je déjà mis en place ? Un jeu, un exercice très scolaire, une situation orale que j’anime pour faire causer (comme transformer la forme d’une phrase) parce qu’on ne passe pas assez par l’oral, un défi d’écriture en grammaire, un atelier conception de problèmes ou d’énigmes en vocabulaire, un atelier de manipulation (quand on n’a pas assez de matériel pour tous)… Ce n’est pas exhaustif mais cela donne quelques idées.
Ce qui me donne envie à chaque fois de recommencer :
- on sort du frontal, c’est moins monotone, et j’aime avoir l’impression que la classe n’est plus pilotée ;
- je me libère du temps pour un groupe, pour des élèves en difficulté ou pour circuler ;
- le travail écrit permet d’adapter la quantité ou la difficulté de ce qui est proposé grâce à des supports progressifs et dont le dernier exercice est proposé aux guépards, aux élèves les plus rapides (merci à Mélissa, une ancienne stagiaire) (après chaque exercice, les élèves doivent se corriger avant de passer à la suite) ;
- les élèves ont l’occasion de discuter entre eux ou de jouer et donc d’apprendre ensemble ;
- les « répétitions » sont plus nombreuses qu’en situation frontale ;
- l’oral occupe une plus grande place, y compris dans l’entraînement.
Ce que j’anticipe car je ne suis pas maso :
- j’écris les corrigés à la main pour mieux anticiper la longueur ou les difficultés possibles pour les élèves et parce que les élèves s’y retrouvent plus facilement ;
- l’organisation de la salle de classe doit être adaptée (j’ai une table d’aide mais les élèves sont installés à l’ancienne, pas en îlots) mais il y a toujours un p’tit moment de flottement le temps que chacun ait son matériel ;
- mieux vaut programmer ces moments avant une récré pour que les élèves puissent ensuite se défouler (on passera à autre chose après la récré) ;
- donner du temps pour apprendre les termes techniques que l’on utilise et guider par quelques consignes ou par un jeu ce travail qui est d’habitude laissé à la responsabilité des familles ou de l’élève lui- même ;
- le niveau de bruit doit être maîtrisé.
Des limites, y compris physiques :
- la préparation matérielle est un peu lourde mais pourra être réinvestie et peut être rentabilisée sur deux séances ;
- il n’est pas toujours possible de savoir ce que les élèves ont (vraiment) fait mais c’est un peu pareil en situation frontale, non ?
- enchaîner ces situations peut exciter les élèves, ils ont souvent besoin d’être à nouveau réunis en « société – classe » après un moment en ateliers.
C’est en visitant des stagiaires que je me suis dit qu’il n’y avait pas de raison de ne pas fonctionner en double niveau dans un simple niveau pour en tirer les avantages. Je suis fan de cette manière de bosser. Bien sûr ce serait plus simple avec un.e autre adulte en classe. Mais c’est aussi un apprentissage nécessaire de l’autonomie et cela questionne les élèves sur leur relation à l’école. Enfin si on prend le temps de les questionner sur le choix par leur enseignant de cette forme de travail, de ses avantages et de ses limites, des conditions qui la rendent possible. Une occasion d’expliciter notre travail et d’y associer nos élèves.
Parlons un p’tit peu jeu et manipulation. Plus les années passent, plus les enfants grandissent, plus on joue en famille et plus je me dis que jouer devrait être obligatoire à la maison comme aller à l’école est obligatoire. Calculs en tous genres, stratégies, sociabilité, culture générale, cohésion familiale… tout est bon dans le jeu ! Quand on parle jeu à l’école, Montessori n’est jamais loin mais je ne l’ai pas lue pour l’instant. Il le faudrait pourtant. Et je suis obligé de dire que j’y vais un peu à reculons sur le sujet car j’aime peu le côté « donneur de leçons » de certains adeptes et encore moins l’ambition de certains parents qui inscrivent leurs enfants en école Montessori. Montessori, c’est devenu une sorte de produit miracle et un prétexte à vendre du matériel à un prix parfois peu raisonnable. Si Maria savait. D’accord, j’y vais un peu fort. Et je ne vais pas me faire que des amis. Et il faut surtout que je prenne le temps de la lire.
Plus sérieusement, c’est quoi un jeu pédagogique (à l’école) ? Un jeu qui met en lumière ce qu’on veut faire apprendre aux élèves ou ce qu’on est en train d’apprendre ou ce qu’on a déjà appris, une connaissance ou une compétence. Le jeu est un moyen de revisiter autrement les contenus scolaires ou de les faire apparaître en espérant motiver les plus récalcitrants et en donnant aux élèves l’occasion d’échanger ce qu’ils comprennent et avec leurs mots à eux. La manipulation qui excite n’apporte pas grand-chose, celle qui oblige à parler de ce qu’on apprend est plus intéressant.